Ne t'inquiète pas pour moi (KUIPERS), Nos étoiles contraires (GREEN), Hate List (BROWN)

by - 30.11.16




Titre : Ne t'inquiète pas pour moi
Auteur : Alice KUIPERS
Albin Michel Jeunesse – 2008
242 pages
10€



Résumé :
Maman, je suis allée au supermarché. Regarde dans le frigo. J'ai arrosé les plantes. J'ai nettoyé la cage de Jeannot Lapin. J'ai rangé le salon. Et la cuisine. Et j'ai fait la vaisselle aussi. Je vais me coucher. Ton esclave à domicile, Claire. Une correspondance par Post-it sur le frigo entre une mère et sa fille. Lorsque la mère tombe malade, le temps presse mais l'espoir demeure. Un livre comme un trésor qui chuchote à l'oreille l'importance de ceux qu'on aime...

 


Mon avis :
Je ne connaissais pas ce roman avant de le découvrir sur Perfect-Readings. Je ne suis pas très fan de ce genre contemporain, dramatique et réaliste, cependant, j'apprécie de faire ce type de découverte. Le roman est court, il se lit vite en raison de sa forme, il est original et pourtant, il est fort et très riche en émotion. C'est un intense récit que je vous conseille de lire, ne serait-ce qu'une fois, pour vous en faire une idée précise. Il a le mérite d'être sympathique et atypique.

La forme m'a de suite enchantée. C'est un petit format, facile à prendre en main, il se décompose en quatre parties : janvier, mars, juin et septembre, avec une cinquième partie P.-S. Comme je le disais en introduction, les 242 pages se sont lues très vite, c'est une correspondance entre une mère et sa fille à travers des post-its. Vous l'aurez donc deviné, il n'est pas possible de mettre des tonnes d'informations sur un petit bout de papier. Les pages défilent, les petits mots aussi, ils font entre deux lignes et une page, rarement plus, c'est osé.

Il faut aimer, beaucoup n'apprécieront pas cette forme, elle donne un rythmé accéléré au récit, c'est peut-être mon seul regret. En effet, j'ai eu du mal à m'imaginer partir de janvier pour finir en septembre, j'avais l'impression qu'il s'était écoulé moins d'une semaine. Cela ajoute un côté oppressant, inéluctable, le fait de voir ce temps défiler à une vitesse effrayante m'a rendue interrogative. C'est certainement l'effet désiré par l'auteure, nous voir courir après le temps alors que la fin, poignante et précipitée, abrupte et impitoyable nous attend au bout, sans que l'on puisse y remédier.

L'intrigue nous plonge dans un quotidien peu facile, la mère et la fille se voient peu. La mère met au monde des enfants dans un hôpital, elle court sans arrêt pour son travail, écrivant de cours messages à sa fille. Cette dernière y répond, elle exécute les tâches domestiques, vit sa vie d'adolescente. Un quotidien qui va se trouver bousculer par l'arrivée de la maladie, la mère tombe gravement malade et s'organise alors l'espoir et l'envie. Le temps perdu que l'on doit rattraper, la maturité devant la gravité des faits... en somme, c'est une histoire simple prenant un tournant inattendu. En ce qui me concerne, j'étais loin de m'imaginer de tels rebondissements dans cette histoire, la fin est touchante, il mérite clairement que l'on s'y arrête quelques minutes.

La plume d'Alice Kuipers est très fluide, elle est simpliste, le format court des messages l'a obligée à se couper, à se simplifier. Toutefois, elle est soignée et les mots employés, soit par la mère, soit par la fille, correspondent à leurs personnalités. J'aurais aimé un peu plus de détails plutôt que certaines répétitions (argent de poche, la fatigue souvent répétée de la mère, même si cela fait partie de sa maladie). Cependant, j'ai apprécié ma lecture, l'auteure sait tout de même nous faire réfléchir à travers ses post-its sur le frigo, c'est un très bon point. Ce n'était pas forcément facile, mais l'auteure a su le gérer avec brio.

Quant aux protagonistes, ils sont très attachants, on voit leur évolution durant tout le récit. J'ai de suite adoré la mère, courageuse et volontaire, aussi forte que fragile, généreuse avec sa fille, attentionnée. C'est un bon personnage devant lequel je ne peux avoir que des regrets de ne pas mieux le connaître. La rapidité du récit fait que l'on a peu de temps pour saisir cette femme, alors que sa fille est plus aisée à cerner. Au départ, je l'appréciais peu, je l'ai jugée un peu égoïste et râleuse, voire même superficielle... puis, elle grandit sévèrement à cause de la maladie de sa mère et commence à changer peu à peu. Ce n'est qu'à la fin que j'ai su pleinement l'apprécier. Les autres personnages sont trop peu présentés pour que l'on puisse émettre le moindre jugement.

En conclusion, c'est une belle surprise, un roman simple et touchant, bien écrit, original et émouvant. Je ne savais pas à quoi m'attendre en le débutant, la rapidité du récit fait que j'ai eu du mal à le lâcher une fois débuté, et en dépit des petits points noirs, il se laisse apprécier. J'ai passé un très bon moment de lecture, la fin est magnifique dans ce qu'il y a de plus triste, les personnages sont amusants à suivre dans leur quotidien chamboulé par la maladie. Un petit bijou qui se doit d'être savouré pleinement.





Titre : Nos étoiles contraires
Auteur : John GREEN
Nathan — 2013
331 pages
16€50


Résumé :
Hazel, 16 ans, est atteinte d’un cancer. Son dernier traitement semble avoir arrêté l’évolution de la maladie, mais elle se sait condamnée. Bien qu'elle s'y ennuie passablement, elle intègre un groupe de soutien, fréquenté par d'autres jeunes malades. C’est là qu’elle rencontre Augustus, un garçon en rémission, qui partage son humour et son goût de la littérature. Entre les deux adolescents, l'attirance est immédiate. Et malgré les réticences d’Hazel, qui a peur de s’impliquer dans une relation dont le temps est compté, leur histoire d’amour commence… les entraînant vite dans un projet un peu fou, ambitieux, drôle et surtout plein de vie.


Mon avis :
Un bon roman, plein de vie, il est très addictif, j'approuve le parti pris de ne pas évoquer la maladie dans le mélodrame, je n'aurais pas adhéré. Je comprends qu'il puisse générer des sentiments contrastés, personnellement, je l'ai bien aimé et je pense que je lirais d'autres récits de l'auteur.

Je me rends compte que ce livre ne s'explique pas vraiment, ça fait plusieurs jours que je l'ai fini et je ne parviens pas à ordonner correctement mes pensées. En fait, ce récit, il se vit. J'entends par là qu'il faut le lire, parce que chaque individu s'en fera sa propre idée, il évoque la vie, la mort, la maladie à travers de belles philosophies. J'ai beaucoup aimé la manière dont l'auteur parle du cancer et de ses conséquences, de ses traitements, c'est vivant, intelligent et respectueux. Loin de l'éternel apitoiement.

L'intrigue est très intéressante, c'est un roman que je nomme « tranche de vie » parce qu'il évoque un moment précis, il nous parle d'un morceau du quotidien d'Hazel dont on suit les pensées. L'immersion est rendue possible grâce au choix du pronom personnel « je », on voit Hazel vivre sa vie, vivre son amitié avec Isaac et son amour pour Gus (Augustus). Bien sûr, le thème est le cancer, mais Hazel est pleine de vie, perspicace et pétillante, drôle et touchante, c'est une héroïne des plus sympathiques et elle fait très certainement partie des protagonistes principaux inoubliables.

J'ai également apprécié son voyage en Hollande pour rencontrer Peter Van Houten, son auteur favori. Cette rencontre est loin de ce que j'espérais, néanmoins, je dois dire que c'est une sacrée personnalité ce type. Je ne sais pas comment l'appréhender et le penser, il est dur et réaliste, peu sympa, mais bien souvent, j'ai trouvé qu'il amenait quelque chose au récit. La famille d'Hazel est merveilleuse, j'ai bien aimé ses parents, même si parfois, j'aurais aimé qu'il fasse plus confiance à leur fille et qu'ils la laissent respirer un peu.

Le personnage de Gus est sans doute celui que j'ai le plus aimé, à égalité avec Isaac. Ce sont deux garçons courageux, drôles et touchants, il leur arrive bien des malheurs sans jamais perdre espoir. Le premier est un garçon très touchant, j'ai adoré ses répliques, sa manière d'être et ce qui lui arrive est bien triste. Ce fut des chapitres très touchants. Quant à Isaac, il est très sympathique, j'ai bien aimé ses interventions dans le récit, il est bienveillant.

Le style de l'auteur est fluide. On commence le récit sans trop savoir comment les événements vont évoluer, on suit Hazel et ses amis dans leur vie, c'est un récit fait de rencontres, d'humour. Les descriptions sont agréables à lire, elles nous plongent directement dans un roman poignant et vivant. Les sentiments d'Hazel sont un réel bonheur à suivre et les répliques sonnent juste, elles sont naturelles. Il y a un peu de poésie et beaucoup de philosophie, j'ai beaucoup aimé le soin apporté aux mots, l'importance de ces derniers, le talent d'écrire d'Hazel et d'Augustus. On lit sans jamais pouvoir s'arrêter, parce que l'on aimerait bien connaître la suite, soucieux de savoir où l'auteur va nous emporter.

En conclusion, je dois dire que c'est un très bon roman. Il est contemporain, très bien écrit, drôle, plein de vie et de poésie, de charme, il évoque le cancer à travers la vie et la mort. Le tout est lumineux, on en ressort conquis, loin d'être affligé, même si les derniers chapitres sont très riches en émotion. C'est un récit évoquant le quotidien, il n'est pas ennuyeux une seule seconde, la plume est très jolie et les personnages sont très attachants, c'est un bon moment de lecture que je recommande vivement.





Titre : Hate List
Auteur : Jennifer BROWN
Albin Michel Wiz — 2012
389 pages


Résumé :
"C'est moi qui ai eu l'idée de la liste. Je n'ai jamais voulu que quelqu'un meure. Est-ce qu'un jour on me pardonnera ?" C'est ce que pense Valérie, effondrée après un drame inexplicable survenu au lycée. Son petit ami, Nick, a ouvert le feu dans la cafétéria, visant un à un tous les élèves de la liste. Cette fameuse liste qu'ils ont écrite pour s'amuser et où figurent ceux qui étaient odieux, lâches, méprisants dans l'établissement. Maintenant, ils sont blessés ou morts. Et Nick s'est suicidé, emportant son secret pour toujours. Mais Valérie elle, est toujours là, enfermée dans une bulle de questions sans réponses. Jusqu'au matin où elle se lève et quitte sa chambre pour retourner au lycée...


Mon avis :
Un roman original et touchant, le sujet évoqué n'est pas facile et je suis contente que le récit ne prenne pas la piste du mélodrame et de la tristesse infinie. Les événements sont durs, mais l'auteure sait laisser de l'espoir, de la volonté et du bonheur, c'est sensible et fin.

L'intrigue est passionnante. Le sujet est dur, il n'est pas facile à traiter, mais l'auteure s'en sort avec brio, on suit le quotidien de Valérie, dans son lycée, lors de la fusillade, à l'hôpital. C'est prenant, parce que l'on connaît son rôle dans la tragédie, elle a écrit cette liste de la haine, elle a survécu à sa blessure infligée par Nick. Toute l'histoire se concentre sur l'explication des faits, sur le « pourquoi », une question qui n'aura jamais de réponses, mais que l'on ne peut s'empêcher de poser. Le récit se centre sur la reconstruction des victimes, leurs angoisses, leurs petits moments de bonheur, mais Valérie, c'est différent. Elle doit affronter le regard des autres, pour certains, elle est une victime, pour d'autres, elle est une meurtrière, même si elle n'a pas tiré. Même sa propre famille la croit suicidaire, prête à terminer le travail de Nick, ses anciens amis ne la traiteront plus pareil.

Il y a des sentiments forts dans ce roman. Il y a le témoignage d'une tuerie terrible, le témoignage d'un harcèlement, celui de Valérie et de Nick avant la fusillade, il y a le doute, la peur, la vengeance des uns, la mort des autres. Il y a une histoire de confiance, de séparation, d'amitié, un devoir de mémoire, des explications à trouver, il existe toute une dimension psychologique autour de Valérie. Elle doit se retrouver, elle est perdue, tout son univers et sa personnalité se trouvent détruits. C'est passionnant à lire, c'est fort et sensible, sans tomber dans le trop ni dans le pas assez, l'auteure a un réel talent pour décrire avec justesse tout ce peut vivre une rescapée de fusillade.

Le roman est construit de manière intelligente. On oscille entre passé et présent, ça peut paraître confus, cependant, j'avoue que cette idée ajoute une dimension humaine au récit. L'histoire est écrite du point de vue de Valérie, et ce passé-présent peut expliquer la fragilité de la jeune femme, son envie de se reconstruire tout en cherchant des réponses. C'est une manière de nous faire sentir qu'elle est perdue entre son passé, son présent.

Très sincèrement, je ne me suis pas sentie perdue, l'auteure possède une très belle plume, elle nous transporte avec elle dans son récit. C'est très bien écrit, les répliques sont justes, les descriptions jolies, les messages sont bien décrits, c'est fluide et agréable à lire. J'ai apprécié les nombreuses apparitions des articles de journaux, ils nous parlent de la fusillade, mais surtout des victimes. Je suis rentrée dans le roman dès les premières lignes et je l'ai lu très rapidement tant je souhaitais obtenir le fin mot de cette histoire. Le final, quoi que rapide, est très beau, plein de vie, il nous rend confiant sur le devenir de Valérie, j'aime ce côté positif, cet état d'esprit optimiste, même si Valérie n'est pas toujours joyeuse – ce qui se comprends entièrement.

Les personnages sont variés et chacun détiens un rôle à jouer. Valérie est au centre de l'histoire, c'est elle qui nous conte son histoire. Je me suis très vite attachée à elle, son évolution la rend encore plus touchante. C'est une jeune fille très sympathique, enfermée dans sa prison, on sent qu'elle cherche à se faire pardonner, à changer, mais qu'elle a du mal et qu'elle a peur. Sa relation avec Nick est très belle, on ressent toute la peine qu'elle peut avoir, elle aime le bon Nick, pas celui qui a tiré, mais celui qui était sympa, à l'écoute. Nick est un garçon qui restera mystérieux, on apprend à le connaître à travers les yeux de Valérie, on fait connaissance d'un garçon charmant. Malheureusement, le harcèlement qu'il subit le contraint à changer peu à peu. Enfin, c'est ce que je crois, car comme Valérie, j'ai cherché à comprendre comment il a pu changer. Ce n’est pas simple. Est-ce sa fascination pour la mort, est-ce ses mauvaises fréquentations des derniers jours, est-ce le ras de bol devant tous ces gens l'insultant à outrance ?

La famille de Valérie m'a exaspérée. Je comprends la peur qu'ils ressentent vis-à-vis de leur fille, mais le traitement qu'ils lui réservent est trop négatif. Sa mère est trop protectrice, le père est juste l'homme le plus monstrueux que j'ai pu lire en fiction, son frère finit lui aussi par s'éloigner. Ce genre de comportement m'a révoltée. Le docteur Hieler est un protagoniste extraordinaire, sympathique, bienveillant, optimiste, c'est une véritable joie de le voir apparaître. J'adore sa personnalité, le fait qu'il veuille tout faire pour aider Valérie, il l'écoute, la conseille, c'est quelqu'un de très bien. J'ai un coup de cœur pour Béa, une femme un brin excentrique, mais terriblement drôle et géniale, je suis contente du rôle qu'elle joue auprès de Valérie. Le revirement de Jessica après la fusillade est compréhensible, Valérie l'a sauvée en dépit de leur animosité, et sa volonté de devenir amie avec Valérie est belle. C'est une jeune fille marquée, mais courageuse et volontaire, j'ai adoré ses apparitions.

En conclusion, ce roman vaut la peine d'être lu au moins une fois. Il est bien écrit, humain, son sujet original est à la fois sensible et dur, la forme est intelligente, Jennifer Brown nous offre un sublime roman. La dimension psychologique est importante, pourtant, elle est merveilleusement bien abordée, nous ne sommes ni dans le trop ni dans le pas assez. Juste ce qu'il faut pour comprendre les personnages, expliquer leurs comportements, assister à leurs reconstructions. Le personnages sont attachants et chacun d'eux joue un rôle important auprès de Valérie, on se sent très proche de ce protagoniste principal, elle est courageuse et touchante. C'est une agréable découverte, je m'attendais à quelque chose de plus mélodramatique, de larmoyant et de très dur, mais l'auteure n'est pas tombée dans ce piège.

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