On lit plus fort et Contemporain : Nous les menteurs (LOCKHART) + Sans prévenir (CROWE) + Tous nos jours parfaits (NIVEN)

by - 31.7.16



Titre : Nous les menteurs 
Titre VO : We were liars
Auteur : Emily LOCKHART
Gallimard Jeunesse (On lit plus fort) – 2015
273 pages
14€50


Résumé :
Une famille belle et distinguée. Une île privée. Une fille brillante, blessée ; un garçon passionné, engagé. Un groupe de quatre adolescents – les Menteurs – dont l'amitié sera destructrice. Une révolution. Un accident. Un secret. Mensonges sur mensonge. Le grand amour. La vérité.

 
Mon avis :
Je tenais à remercier les éditions Gallimard Jeunesse (Chroniqueurs On lit plus fort) pour ce nouveau partenariat. J'avoue avoir été sceptique au début. Le coffret dans lequel il était emballé était joli, les petits mots sympathiques, esthétiquement, ce fut une belle idée. Seulement, le résumé ne m'intriguait pas véritablement, ce n'est pas trop mon style habituel. J'ai bien fait de l'ouvrir par curiosité, je l'ai dévoré en deux jours, malgré les avis mitigés qu'il récolte, Nous les menteurs est un très bon roman. Original et prenant, j'adore ce genre de pari risqué, le résultat m'a beaucoup enchantée.

Le récit est écrit de manière originale. Il se découpe en quatre parties, l'été des quinze ans, celui des dix-sept ans, entre, nous trouvons les mensonges, la vérité et l'enquête de l'héroïne principale, Cadence. Les phrases sont étrangement coupées, j'aurais pu être très agacée par ce procédé, s'il ne fonctionnait pas. Or, il marche, il fait partie intégrante du style de l'auteure, incisif, fluide et agréable à lire, on se plonge très vite dans les pensées de Cadence et l'on suit sa quête, ses espoirs, ses secrets. Les chapitres sont courts et la plume d'Emily Lockhart se lit tellement facilement qu'on se sent très vite happée et il m'a été impossible de le lâcher, c'est plutôt rare, surtout en matière de roman contemporain.

L'ambiance est très prenante. Cette famille si parfaite se craquelle depuis la mort de la grand-mère. Les possessions deviennent sujet de querelle, les trois sœurs se disputent maisons et argent en instrumentalisant leurs enfants, la pureté est de rigueur... C'est une famille que l'on croit bling-bling et sa descente en enfer aurait pu nous amuser, mais ce n'est pas le cas. J'ai beaucoup aimé le fait que Cadence parle des problèmes de sa famille à travers ses réécritures de contes, c'est toujours très drôle à lire et poignant. Il y a de la tension, du drame, des problèmes de familles, un peu de violence, de la manipulation, cette famille est loin d'être aussi parfaite – comme elle le prétend. C'est donc une ambiance lourde, mais jamais pesante, je suis demeurée scotchée par l'avancement du récit, les affaires de famille, alors que d'ordinaire, ce genre de récit ne me plaît guère.

Seulement, l'intrigue est bien menée. Elle ne tourne pas en rond, s'installe très vite et ne nous torture pas pendant des heures. Alors effectivement, je me suis bien doutée de quelques brides du dénouement avant la fin, cependant, la fin reste ahurissante et forte. Rien que le fait de l'énoncer est en soi extraordinaire et touchant. J'ai beaucoup aimé le fait de passer d'une bonne dose de bonheur à l'incompréhension totale, aux malaises de Cadence, aux retrouvailles teintées de mystère. Le fait qu'elle cherche à tout prix à se souvenir est bien écrit et le récit est sincèrement riche en émotions. Je suis franchement enthousiaste et contente d'avoir lu cette histoire, elle est simple, toutefois, elle est marquante.

Cadence est vraiment intéressante, elle change, son point de vue sur sa famille évolue. Avant, elle suivait, sans trop se poser de questions, mais son amour pour Gat, Mirren et Johnny l'ont fait changé et en bien. Grâce à elle et à l'emploi du « je », on peut facilement comprendre les bouleversements, les incertitudes et les questionnements. J'ai beaucoup apprécié les trois autres « Menteurs », Gat, Mirren et Johnny sont super sympathiques et tout aussi attachants, drôles et ils forment un quatuor si incroyable. En revanche, il est certain que j'ai eu plus de mal avec le restant de la famille Sinclair, la mère de Cadence instrumentalise trop sa fille, comme la mère de Mirren. Le grand-père est tout à fait détestable, c'est terrible. Ils sont en revanche, travaillés, humains et fascinants.

En conclusion, beaucoup ont été dérangés par cette intrigue, ce n'est pas mon cas, au contraire, sa différence et son originalité lui permettent de se détacher et de m'avoir fait passer un très bon moment de lecture. J'ai été fascinée par la famille Sinclair et ses préceptes, sa volonté de paraître oubliant ainsi ce qu'était une famille. Nos quatre adolescents sont touchants, forts, amusants, ils ont envie de changer leur situation, de ne pas se déchirer comme leurs parents. Dans leurs rêveries, il y a de très bons ingrédients, des émotions, de la tension, des mensonges, une quête d'identité, de se définir. Ma lecture fut trop courte, j'aurais aimé ne pas quitter tout de suite ces personnages vivants et cette intrigue très riche en sentiments. Je ne pensais pas autant apprécier ce récit et il restera une superbe découverte.



Titre : Sans prévenir
Titre VO : In Bloom
Auteur : Matthew CROW
Gallimard Jeunesse (On lit plus fort) – 2014
307 pages – 11€90


Résumé :
A quinze ans, Francis Wootton est passionné de vieux films, de musique rock et de lectures romantiques. Mais avant tout, il ne se prend pas au sérieux. Pas plus que les excentricités de sa mère et la désinvolture de son adulte de frère. Lorsqu'on lui diagnostique une leucémie, ses priorités changent. Il y a l'horreur d'être retardé d'une année au lycée, la menace d'une calvitie imminente, la nécessite de retrouver sa plus belle chemise au cas ou une pop star lui rendrait visite pour une photo... Mais il n'imaginait pas rencontrer Ambre, son caractère de chien son humour féroce, sa vulnérabilité désarmante et irrésistible.


Mon avis :
Je remercie les éditions Gallimard (On lit plus fort) pour ce partenariat, cependant, je l'affirme, le comparer à Nos étoiles contraires va plus lui desservir. Il est différent, le thème de la maladie les réunit, mais il a son style, son histoire, sa force et ses faiblesses. J'avoue n'avoir aucune préférence pour l'un ou pour l'autre, je les juge sympathiques et touchants. Je le recommande, il a son charme.

L'intrigue nous présente un adolescent nommé Francis et pour qui la vie était loin d'être un fleuve tranquille. Son père a déserté le foyer, il a perdu sa sœur jumelle, il est loin d'être adulé au lycée, toutefois, il est un brin attachant. Il n'est pas comme les garçons, il est sensible et rock, c'est une personnalité assez intéressante pour peu que l'on s'y penche sérieusement. Un jour, on lui diagnostique un cancer, sa vie bascule, il se retrouve aussi seul qu'entouré, il se pose des questions et pourtant affronte la maladie avec flegme. Il se sent entre deux mondes et seule l'arrivée d'Ambre va le déconcerter.

J'avais peur d'une intrigue similaire à Nos étoiles contraires, il y a des similitudes, mais très vite, le récit sait montrer sa propre âme. J'ai adoré découvrir cette histoire de famille, d'amitié et d'amour, trois bons ingrédients maniés avec brio. Ce n'est peut-être pas assez transcendant pour être mémorable, toutefois, j'ai passé un excellent moment en suivant le quotidien des Wootton, leurs peines comme leurs éclats de rire. Ils sont un peu fous, mais ils sont géniaux. Ambre est un vrai détonateur et j'ai été très surprise par la portée philosophique de cette rencontre explosive. La fin ne m'aura pas laissée indifférente, elle est très belle. Il y a de la force et des sentiments, de la poésie comme des propos durs, cette curieuse alchimie en déroutera plus d'un, sur moi, elle a opéré lentement, mais sûrement.

La maladie est en somme un prétexte pour parler du thème primordial du roman : la rencontre de deux protagonistes très différents que la malchance aura placés sur un même chemin. En dépit de leurs divergences, Francis et Ambre forment un duo atypique et touchant, ils sont mes personnages chouchous. Il se passe entre eux quelque chose de fort, très bien décrit par l'auteur. Par ailleurs, le cancer est bien montré, il n'est pas aussi prononcé que je l'aurais souhaité, toutefois, j'ai vite oublié ce défaut. J'étais bien trop préoccupée par l'évolution du tandem central et sur le dénouement de l'histoire.

En revanche, la plume de Matthew Crow se laisse lire, elle est simple, jeune, le langage commun passe tout seul. Je râle généralement devant la vulgarité sauf quand elle est justifiée, ici c'est le cas, ouf ! Les dialogues respectent le caractère des personnages, ils nous interrogent sur la vie, sur le quotidien, sur nos relations avec les autres. Il existe dans ce roman une portée philosophique, c'est léger, mais cela m'a suffi pour me plaire et me laisser emporter. Les descriptions sont bien écrites, je me suis aisément imaginé les lieux ou les personnages.

En conclusion, l'histoire est prenante, et même si ce roman n'entrera pas dans mes favoris (pas plus que Nos étoiles contraires), je lui trouve du charme et de la maturité. Il a quelque chose de fort, notamment grâce à ce très beau tandem que forme Francis et Ambre, les personnages ont un côté déjanté et attachant. J'ai adoré suivre cette histoire d'amitié, d'amour et de famille, brisée par le deuil, la maladie, mais qui ne baisse jamais les bras. L'espoir est un message très fort, le non-apitoiement sur lui de Francis est une bonne leçon, j'ai horreur du trop larmoyant, c'est pour cela que j'ai apprécié Ambre. Un personnage certainement inoubliable, à sa manière.



Titre : Tous nos jours parfaits
Titre VO : All The Bright Places
Auteur : Jennifer NIVEN
Gallimard Jeunesse (On lit plus fort) — 2015
377 pages


Résumé :
Theodore Finch veut en finir avec la vie. Violet Markey est dévastée par la mort de sa sœur. Ils se sont rencontrés sur les toits du lycée, au bord du vide, et c'est ainsi que leur histoire a commencé. Ce n'est qu'ensemble qu'ils arrivent à être eux-mêmes... Mais tandis que le monde de Violet s'épanouit, celui de Finch ne fait que rétrécir. La magie de leurs jours parfaits pourra-t-elle les sauver ?


 
Mon avis :
Je l'ai terminé rapidement et je ne sais toujours pas quoi penser dessus. Je reste prise entre deux feux, indécise quant à savoir si j'ai aimé ou pas cette lecture, je demeure mitigée, incertaine et je ne parviens pas à donner un avis tranché. Je remercie les éditions Gallimard Jeunesse (On lit plus fort) pour ce partenariat. Ce roman est atypique, il ne laissera pas indifférent.

Ce qui m'a foncièrement déplût c'est qu'il est parfois atrocement long et répétitif. Il ne se passe pas grand-chose pendant une bonne partie et même le fait que les personnages évoluent psychologiquement ne m'a pas permis de me tenir éveillée. Parce qu'il est long sur certains points, il devient moins percutant et prenant — pour ma part. Il aurait gagné en force s'il avait été amputé d'une bonne moitié. Dans ce type de récit où l'accent est mis sur la psychologie, la mort, le suicide, la colère, inutile de tirer en longueur, ça peut vite devenir glauque, moralisateur ou mélodramatique. C'est plus sur le dernier point que j'avais l'impression de tomber. C'est dommage.

Parce que sinon, il est très bien écrit, la plume de l'auteure est très belle, fluide à lire, précise dans les descriptions et le rendu des émotions. Jennifer Niven nous immerge totalement dans ce monde contemporain, dans ce lycée où se rendent Finch et Violet, dans leur quotidien très différent, dans leur promenade à travers l'état dans lequel ils vivent. Ce sont de beaux épisodes ces découvertes des paysages et des monuments, j'aime beaucoup les conversations entre Violet et Finch par ailleurs.

L'histoire est touchante, les deux protagonistes principaux sont réunis par la mort, Violet a perdu sa sœur, Finch veut en finir avec la vie ; tous deux se retrouvent à réaliser un devoir commun, celui de visiter des monuments importants et leurs vies vont se trouver changer à jamais. Violet devient peu à peu plus ouverte et joyeuse tandis que le monde de Finch s'éteint jour après jour. C'est une intrigue autour de la vie, de la mort, de la reconstruction, du phénomène du « survivant », du suicide, de la disparition et de l'amour. Il y a beaucoup d'ingrédients passionnants à suivre et je regrette les longueurs qui ne m'ont pas permis de pleinement apprécier l'histoire à sa juste valeur. Parce que véritablement, elle mérite le détour, elle est atypique, bien écrite et pensée, d'une très haute teneur psychologique. On sent que l'auteure a à la fois vécu ces événements et s'est renseigné dessus. Elle nous apporte beaucoup d'informations et lire son témoignage à la fin du roman est très touchant.

Ensuite, cette histoire doit beaucoup à ses personnages. Je n'ai pas aimé Violet, j'ai eu dû mal avec son caractère, elle m'était totalement indifférente au début du roman. Il n'y a que vers la fin que j'ai fini par me réconcilier avec elle, elle est devenue plus fascinante, plus intéressante à lire. Elle ose enfin parler de sa sœur et de Finch à ses parents, à leur parler des problèmes de Finch, à trouver des solutions au lieu de le laisser tomber. Ce qui me fait dire que j'ai détesté les parents de Violet comme ceux de Finch, le père de Theodore est une ordure, la mère est détestable dans son refus de s'occuper de ses enfants, les parents de Violet sont surprotecteurs et méchants concernant Finch. Ce dernier est juste extraordinaire, captivant, il est instable, mais tellement adorable, rêveur, différent, j'ai beaucoup aimé sa personnalité, ses problèmes, sa vision des choses. J'ai été très peinée de voir qu'aussi peu de personnes sont sensibles à son charme dans le roman, mais aussi que peu de personnes semblaient voir qu'il avait besoin d'aide, d'une main tendue, d'un vrai horizon. J'ai été très touchée par son histoire, par la révélation le concernant, par son choix à la fin, il est le personnage phare de ce roman. Je n'ai pas été assez sensible sur les autres personnages, excepté Amanda, Ryan que j'ai trouvé intéressants ou les deux sœurs de Finch, très sympathiques.

En conclusion, il aurait été plus court, il serait devenu bien plus percutant et fort, sa forte teneur émotionnelle aurait été plus juste (moins mélodrame par moment) et j'aurais vraiment eu un coup de cœur. Finch et l'écriture, ainsi que les sujets évoqués dans l'intrigue m'ont permis de rester captivée par l'histoire, il y a un personnage inoubliable, une plume très riche et des sujets graves évoqués avec justesse. Le roman s'avère très prenant dans ses dernières pages, à cause de la tournure des événements. J'ai un avis mitigé, mais globalement positif pour ce roman qui est unique.



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